Budget 2018 : Intervention liminaire de Muriel Casalaspro – CM 28/03/2018
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Cette année plus que jamais la situation faite par l’État aux collectivités territoriales ne manque pas de nous interroger et de nous inquiéter tant les règles sont floues et les incertitudes nombreuses : la MGP restera-t-elle une coquille vide, permettra-t-elle des rééquilibrages entre l’ouest et l’est de Paris ? Les départements vont-ils disparaître au profit des établissements publics territoriaux ? Quels financements vont accompagner les transferts de compétence à venir ?

Ainsi, le paysage institutionnel n’est pas clarifié, notamment en Ile-de-France et la contractualisation demandée aux grandes villes remet en cause le principe de libre administration des communes en leur imposant des objectifs décidés d’en haut, les marges de manœuvre s’amenuisent, les choix sont indirectement confisqués voire punis par des «malus» financiers. On organise l’impuissance des maires qui sont pourtant un échelon démocratique fondamental. Comme le disait récemment la Maire de Paris : « les maires doivent avoir la liberté de pouvoir agir et d’être jugés sur ce qu’ils font, pas sur ce qu’on les empêche de faire. »

En tant qu’écologistes nous sommes inquiets de la recentralisation qui s’opère sous nos yeux et qui creuse encore plus le déficit démocratique. La vraie question qui se pose n’est pas tant celle du schéma institutionnel mais celle des services à la population et de notre capacité à répondre aux grands enjeux écologiques (qui ne concernent pas que l’environnement) et opérer les choix d’avenir.

A ce titre et s’agissant de choix à opérer nous avons toujours des réserves du point de vue de la méthode d’élaboration du budget, qui a son importance. La méthode est la condition d’un travail collectif et de la prise en compte réelle des sensibilités de chaque composante de la majorité. Nous regrettons donc d’avoir dû élaborer ce budget sans bilan précis des réformes entreprises dans le secteur de ressources humaines, ni de l’application du nouveau quotient familial. Nous n’avons toujours pas de véritable plan pluriannuel d’investissement et notre visibilité reste donc à trop court terme.

Contrairement aux années précédentes, l’élaboration budgétaire en matière de dépenses de fonctionnement n’a pas donné lieu à une baisse mécanique et quasi uniforme demandée aux services. C’est une bouffée d’oxygène indispensable pour l’ensemble des agents mobilisés au quotidien pour mener les actions auprès de la population, c’est une nécessité pour ne pas dégrader davantage des conditions de travail parfois difficiles. Pour autant, l’équation reste compliquée à résoudre et demande d’amplifier les efforts pour permettre au personnel de remplir ses missions en affectant les moyens de manière adaptée et en fonction de choix collectifs.

Nous saluons l’effort important qui est accompli pour réduire la précarité, qui vient compléter et amplifier la politique entamée avant 2014 de titularisation et de hausse des plus bas salaires.

Nous regrettons néanmoins la suppression de postes stratégiques à l’énergie ou aux financements européens, postes qui permettent souvent de réaliser des économies par ailleurs.

Si le recours à des délégations de service public peut s’envisager avec prudence et discernement, il doit se faire uniquement en direction de structures de l’ESS et d’aide à l’insertion et donner lieu à une définition précise et partagée des périmètres concernés.

Pour la première fois, le compte administratif 2017 et le budget primitif 2018 sont présentés lors de la même séance du conseil municipal.

C’est une bonne occasion d’avoir une approche complète et de permettre de faire le bilan des opérations prévues tout en se projetant. On ne peut que saluer l’effort réalisé pour limiter le recours aux décisions modificatives mais on mesure aussi l’écart entre les ambitions inscrites et les réalisations effectives en termes d’investissement.

A ce titre et avec un budget d’investissement déjà structurellement faible pour une ville de notre taille, on remarque un taux de réalisation de 51% ce qui n’est pas satisfaisant et réduit encore la réalité finale des investissements sur l’année 2017. Cette difficulté à réaliser un niveau modeste d’investissement est en partie liée à un manque de personnel et cela doit nous interroger sur nos priorités.

On approuve qu’une partie significative du budget d’investissement soit consacré au budget participatif : le foisonnement de projets qui en résulte bouscule les habitudes et permet un croisement intéressant entre l’expertise technique des services et l’expertise citoyenne des habitants.

Nous partageons les priorités qui sont faites pour les écoles et les espaces publics mais regrettons de ne pouvoir financer davantage de réfection de voirie, d’aménagements d’espaces verts et de loisirs, de circulations douces ou encore de constructions d’équipements. C’est pourquoi nous avons demandé un abondement de 1 million d’euros.

Si la campagne de plantation et de jardinage citoyen voulue dans le cadre de l’opération «Montreuil est mon jardin» va dans le bon sens et permet de valoriser des actions existantes, il ne faudrait pas que d’autres choix viennent contredire les ambitions écologiques et leur mise en œuvre dans tous les domaines. A ce titre le groupe Montreuil Écologistes et citoyens continuera à dénoncer la construction de logements en lisère du secteur classé des MAP et demande que les orientations du schéma de trame verte et bleue voté à Est Ensemble soient respectées sur les parcelles naturelles à l’est du projet EIF. Nous sommes d’ailleurs scandalisés d’apprendre que certains des murs à Pêches de ce secteur ont été partiellement détruits par des engins de chantier alors que le projet est souvent présenté comme un moyen de les sauvegarder. Alors que l’urbanisation est croissante en Ile de France, que les surfaces de pleine terre se font rares, nous devons préserver cet espace et ce patrimoine et trouver un autre montage financier pour mener à bien le projet d’économie sociale et solidaire et la préservation des murs à pêches.

Par ailleurs et bien que la recherche de recettes soit indispensable, nous restons particulièrement vigilants face à la tentation pour certaines entreprises peu vertueuses sur le plan écologique de s’acheter une bonne conduite en abondant le fonds de dotation Montreuil Solidaire. Accepter des fonds de ces entreprises rend peu crédible le combat que nous menons par ailleurs contre elles. Nous demandons également qu’une transparence soit faite sur les activités et le mode d’administration de ce fonds.

Si le budget est la traduction des choix politiques de notre municipalité, nous ne voudrions pas que la ligne budgétaire de 500 000 euros, somme importante, inscrite pour 2018 au titre de la mise en place d’un centre de supervision urbain pour visionner les images des caméras placés notamment sur les bâtiments publics ne soit le début de l’installation de caméras supplémentaires de vidéosurveillance sur l’espace public. Ce n’est pas qu’une question idéologique mais toutes les études montrent que ces dispositifs sont aussi coûteux qu’inefficaces.

Vous l’aurez compris, nous continuons à plaider encore et toujours pour un budget résolument tourné vers la transition écologique, un budget d’investissement à la hauteur des enjeux car les dépenses d’aujourd’hui constitueront les économies de demain. Nous portons en cela une vision, défendons une méthode, proposons des alternatives qui rencontrent de nombreux échos dans la population. Si nous soutenons de nombreuses actions, nous regrettons que malgré nos alertes répétées, malgré nos propositions, celles-ci ne soient pas davantage prises en compte dans nos choix et nos actions collectifs.