Le Parisien du 07/02/19 – « Montreuil : le fonds solidaire qui embarrasse le maire »
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Opacité, clientélisme… Patrice Bessac (PCF) a fait face aux critiques de tous bords, en conseil municipal mercredi, en présentant le rapport du fonds de dotation.

C’est écrit noir sur blanc au début du rapport d’activités : « Le fonds de dotation est une structure autonome et indépendante de la ville de Montreuil, au statut juridique propre. Il n’est ni une association, ni un budget annexe de la ville. » A écouter le débat en conseil municipal mercredi, nombreux sont les élus à douter de cet avant-propos.

Présidé par l’édile

Les décisions sont prises par le conseil d’administration, présidé par le maire, et théoriquement constitué d’un élu du conseil municipal et de représentants de la société civile. Théoriquement car Choukri Yonis, l’adjointe (PS), qui occupait ce poste jusqu’à 2017 en a démissionné pour dénoncer l’opacité du fonds. Et elle n’a pas encore été remplacée.

« Ce fonctionnement revient à distribuer des subventions sans transparence ni concertation », argumente l’intéressée. Difficile à avaler pour l’adjointe, justement chargée de la vie associative. « Comment faire s’il existe des actions comme ce fonds, en parallèle, et qu’on découvre deux ans après l’attribution des sommes ? »

« Vous disposez d’un pouvoir discrétionnaire sur ce qui est financé », adresse, au maire, l’élue d’opposition Olga Ruiz (Ma ville j’y crois), soupçonnant « clientélisme » et « conflits d’intérêts ».

Une demande d’audit à la chambre des comptes

Même critique venue de l’opposante (LR) Murielle Mazé qui évoque « une mandature des passe-droits et des petits arrangements » et annonce son intention de « demander un audit à la chambre des comptes ».

Dans les rangs de la majorité, la France insoumise se désolidarise de ce mécénat – « Ce n’est pas la forme de partage de richesse à laquelle nous sommes favorables », résume Franck Boissier – tout comme Gilles Robel (AEV- écologiste) qui explique que son groupe « n’accepte pas un circuit opaque de financements » : « Ce qui est légal n’est pas toujours légitime », déplore-t-il.

Car le maire réfute toute irrégularité : « A moins d’accuser le préfet et le commissaire aux comptes de fermer les yeux sur de quelconques agissements, nous devrions raison garder quant aux propos exagérés et déplacés que nous avons pu lire ici ou là », se défend Patrice Bessac, avançant « le moment merveilleux » passé pour les 11 000 familles récemment invitées au cirque.

De nouvelles conventions annoncées

Il espère même faire « monter en puissance » ce fonds et annonce des conventions à venir « pour les sentiers de la biodiversité dans les murs à pêches et la restauration de l’église Saint-Pierre-Saint-Paul ». Problème potentiel : René Richard, le secrétaire de Montreuil solidaire, est également animateur de l’association de sauvegarde de la même église. « Avec le fonds, il s’agit de mettre en valeur la façade, ça ne passe pas par mon association. Cela n’a rien à voir avec le projet de restauration », assure ce jeudi l’intéressé.

Le trésorier du même fonds, Jacques Tarquis, colisitier de Patrice Bessac aux municipales de 2014, visé sans être nommé, est aussi vice-président du Centre civique d’étude du fait religieux (CCEFR). Cette association a reçu, en 2017, la modique somme de 4 000 € pour l’organisation d’un gala. « A partir du moment où le conseil d’administration décide et valide tel ou tel projet… Et bien, je suis au conseil d’administration », assume-t-il, indiquant toutefois que les discussions préalables se sont déroulées avec le président du CCEFR et qu’il n’a « pas participé à la discussion » au moment du vote.

MONTREUIL SOLIDAIRE, UNE FORME DE MÉCÉNAT

En 2017, le fonds Montreuil solidaire, créé en 2015, a recueilli 575 000 € de la part de 40 donateurs, parmi lesquels des géants comme BNP Paribas, Bouygues Immobilier, Veolia, et des plus petites entreprises. Cela leur ouvre droit à une réduction d’impôt sur le revenu ou sur les sociétés égale à 60 % du montant des dons dans la limite de 5 ‰ du chiffre d’affaires.

Côté bénéficiaires, le gros de la somme revient à l’organisation du meeting d’athlétisme (170 000 € en 2017), le reste étant distribué à des actions ponctuelles portées par des associations ou par la ville. A titre d’exemple : Montreuil Mois a reçu 10 000 € pour la création d’un agenda culturel. La mairie a reçu 30 000 € pour une sortie de 200 à 250 familles au parc Saint-Paul (Oise).

L’article en ligne : http://www.leparisien.fr/seine-saint-denis-93/montreuil-le-fonds-solidaire-qui-embarrasse-le-maire-07-02-2019-8006853.php