Patrimoine des Murs à Pêches : ouvrir oui, dénaturer non!
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Après le nettoyage, des vestiges de murs et le ru Gobétue qui alimente une mare

Alors que l’Europe et la France s’apprêtent à célébrer leur patrimoine le week-end prochain, les Murs-à-pêches de Montreuil sont encore au centre de l’attention et des polémiques. Deux projets bien distincts sont menés par la puissance publique dans le secteur, il convient de ne pas les confondre.
Au cours de l’été une opération de débroussaillage et de nettoyage de certaines parcelles aux abords du ru Gobétue a été menée, dans le cadre d’un projet intitulé les « sentiers de la biodiversité. » Ce projet a bénéficié de financements européens à l’obtention desquels a oeuvré Gilles Robel, en tant que conseiller délégué aux financements européens à Est Ensemble. Nous sommes favorables à ce projet qui vise à créer des cheminements entre les parcelles si caractéristiques des Murs-à-pêches, à préserver le patrimoine et le paysage, à favoriser la découverte de cet espace exceptionnel, à valoriser la biodiversité en milieu urbain en recréant des continuités écologiques et en développant des activités « agri-culturelles ». Redisons-le, nous ne sommes pas favorables à ce qu’on fige ni à ce qu’on muséifie le patrimoine des Murs-à-pêches.
Nous partageons cependant les réserves des associations qui s’occupent du secteur depuis des années, et dont l’expertise doit être saluée, quant à la méthode employée pour réaliser ce nettoyage à temps pour les journées du patrimoine. Au lieu de mener cette opération de concert avec les associations, au lieu de tirer parti de leur savoir-faire, la Mairie a préféré faire appel à une grosse entreprise de BTP réputée pour ne pas vraiment faire de la dentelle. Or la dentelle, quand on sait combien les murs centenaires qui encadrent ces parcelles sont fragiles, c’est précisément ce dont on a besoin. Résultat : les parcelles sont en effet nettoyées, voire aseptisées, le ru est visible et se transforme en une énorme mare, mais plusieurs murs – dont certains n’étaient pas en bon état – se sont effondrés, et la récupération des matériaux (plâtras recyclable en plâtre, moellons…) va être difficile, voire impossible. La biodiversité s’accommode mal elle aussi des bulldozers.

Un mur effondré, l’autre résiste vaillamment

Quant aux riverains qui jardinent sur les parcelles qui jouxtent le terrain, et se trouvent subitement exposés aux regards suite à l’effondrement des murs, ils se plaignent à juste titre du manque d’information. Il leur faudra attendre le prochain numéro du Montreuillois pour savoir de quoi il retourne.

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L’autre projet dont nous avons abondamment parlé ici, c’est EIF https://montreuilecolo.eelv.fr/murs-a-peches-non-au-rouleau-compresseur/ Là encore, répétons-le, nous sommes favorables à la réhabilitation de l’usine, mais pas à la construction de 83 logements sur des parcelles dotées du Murs-à pêches pour la financer. La Mairie doit faire la transparence sur le projet et faire pression sur son promoteur Urbanera-Bouygues pour que des alternatives soient proposées. L’enquête publique sur le PLU aurait pu permettre de modifier la donne en invalidant l’Orientation d’Aménagement de Programmation du secteur, qui est bien trop permissive selon nous.

Enquête publique sur le PLU : notre contribution pour protéger les Murs-à-pêches

Hélas, trois fois hélas, tout en soulignant le nombre « exceptionnel » d’observations recensées, dont une part importante (21% des remarques) concernait ce secteur qui ne représente pourtant qu’une très petite partie de la ville, le rapport du commissaire-enquêteur épouse entièrement le point de vue des promoteurs du projet Bouygues : « il faut reconnaître que depuis de nombreuses années le site n’est plus aussi bucolique que l’affirment ses défenseurs… Les murs en lisière sont visibles de l’extérieur et on peut constater leur état de délabrement. Une remise en état est effectivement souhaitable mais nécessite des financements. Le projet de cette construction de 83 logements a dans ce sens ». Si le même raisonnement avait été tenu à propos des autres parcelles, le secteur serait couvert de logements nécessaires… pour financer la restauration des murs! Comme s’il n’existait pas d’autres sources de financement! Comme si les logements ne pouvaient pas être construits ailleurs que sur des sols naturels!  Et comme si le paysage des Murs-à-pêches pouvait s’accommoder de ces constructions de logements sans être dénaturé!
Le comble est que le commissaire-enquêteur souligne par ailleurs que le taux d’espace vert par habitant à Montreuil, qui est de 5,8M2 par habitant, est « très faible et très loin des 10m2 souhaités par le SDRIF. Ce n’est pas artificialiser 1 hectare de terres naturelles en plus qui va faire croître ce taux.
Autre paradoxe, l’idée défendue par les promoteurs du projet selon laquelle il faudrait réintroduire de la puissance publique pour éviter la « privatisation des parcelles par des associations ». Entre une prétendue « privatisation » par des associations qui font en réalité vivre ce patrimoine depuis des années, et une privatisation bien réelle par la construction par Bouygues de logements individuels accessibles à la propriété (même s’il y aura un peu de logement social), nous savons faire la part des choses. Et nous continuons d’espérer que notre municipalité saura enfin trouver une solution de compromis susceptible de contenter les partisans de la réhabilitation de l’usine et les défenseurs du patrimoine naturel et historique de Montreuil.

Nous donnons rendez-vous aux personnes qui souhaitent découvrir ce patrimoine et comprendre ces projets dimanche 16 septembre à 14h devant l’usine EIF rue Pierre de Montreuil

P.S. Dans un précédent article, nous dénoncions le fait que de profondes tranchées aient été réalisées sur les parcelles à l’est de l’usine EIF, qui ont contribué à l’effondrement de certains murs. Nous avons appris indirectement qu’elles ont été creusées pour éviter … une ZAD. Nous condamnons fermement ces méthodes :

Murs-à-Pêches : halte au massacre!